Cord 812 Phaéton 1937.

- mai 04, 2022

"" A Sedan, Including Its "Coffin Nose" Nickname ""

Maquette Revell au 1/25. Référence : n°7297.

Historique : Les plus belles voitures du Monde, par Jacques Rousseau et Michel Iatca, aux éditions Hachette 1963.

Les trois derniers paragraphes pages 86 et 87 du livre : L'Univers des voitures, classiques 1886/1940, aux éditions Gründ 2001.

Réalisation maquette et diorama, par mon ami Francis Michelet.

Les photos du montage sont de Francis, utilisation avec son autorisation.

Les photos de la maquette terminée sont de l'exposition de Labry (54) France en 2022.

Errett Lobban Cord (1894 - 1974) était le type de businessman avisé, parvenu à se créer seul, selon une dynamique de la réussite spécifiquement américaine, une fortune considérable dans le négoce des voitures. Cord avait d'abord vendu des Ford d'occasion, puis des "Moon", petite marque de qualité. Lorsque que Moon fut en difficulté, Cord racheta la vieille marque Auburn, elle-même en décadence. En modernisant simultanément la voiture et les méthodes de prospection commerciale, cinq ans lui suffirent à décupler les bénéfices et à asseoir la réputation d'Auburn, voiture élégante à caractère sportif. Entre-temps, Cord avait repris le contrôle -- entre autres sociétés -- d'une usine de moteurs (Lycoming) et d'un vaste atelier de carrosseries.

Maître chez lui, disposant d'un financement puissant, Cord allait frapper le grand coup, choisissant pour cela la période très euphorique de la fin de l'année 1928. Il allait attaquer sur trois fronts, sous le signe commun de l'originalité mécanique liée à la beauté des lignes :

-- Le domaine de la voiture moyenne : l'arme choisie était l'Auburn, remarquablement carrossée et dotée d'un puissant moteur 8 cylindres, incroyable affaire pour l'acheteur, ou tout au moins en théorie si la qualité du produit avait suivi !

-- Le domaine de la voiture de luxe : Cord utilisa là une arme absolument secrète qu'il lança sous son nom; la 8 cylindres Cord à roues avant motrices; au premier bond, ce long lévrier aplati et élancé fit vieillir toute la construction américaine en quelques mois.

-- Le domaine de la super-voiture de classe mondiale : pour atteindre cet objectif, Cord avait racheté l'affaire des frères Duesenberg auxquels, associés à Harry Miller (le constructeur rival des Duesenberg à Indiapolis !), il avait confié l'étude d'une voiture gigantesque : la Duesenberg modèle J. Celle-ci allait devenir la plus fabuleuse création américaine, union d'une mécanique de course et d'une carrosserie délicatement princière, l'ensemble ayant la taille d'un mammouth.

Avec cet extraordinaire brelan entre les mains, Cord allait mener le jeu aux "Grands" américains, puis aux constructeurs européens de voitures de luxe. Mais il fut finalement défait, sans honte d'ailleurs, à la fin de ce combat de titan, non sans avoir proposé au monde entier et à l'histoire de l'automobile quelques-uns des plus attachants véhicules construits aux Etats-Unis.

La Cord 812 conduite intérieure Beverly disposait de 170 ch avec le moteur à compresseur.

Source: L'Univers des Voitures 1886/1940, aux éditions Gründ 2001.

L'Auburn et les 3 amis : Ce n'est pas le titre d'une fable, mais la légende convenant à cette image réunissant, devant le garage de la rue de Sablon-ville à Paris, et autour d'une 8 cylindres Auburn 1935 : le campionissimo italien Tazio Nuvolari, l'as français Raymond Sommer et E. Z. Sadovitch, importateur du célèbre brelan de marques Auburn, Cord, Duesenberg (Collection M. Sadovitch).

Permanence de la beauté : Mlle. Colette d'Arville au Concours d’Élégance de 1930, devant le coupé-berline Duesenberg "J", signé par Hibbard et Darrin. Les années n'ont pas entamé la très pure majesté de cette voiture (à noter la Cadillac V 16 derrière la "Duesïe") (Photo Massis).

Source des deux photos: Les plus belles voiture du Monde, aux éditions Hachette, 1963.

Pendant ce temps là, Cord avait bousculé toutes les traditions et dirigé le style des voitures 1932-1939. Reprenons brièvement l'examen de chacune de ces cartes maîtresse.

Pour Auburn, après la création des inoubliables 8 cylindres de sport carrossée en "speedster" -- ces 2 places à pointe dite bateau -- Cord avait repris le même thème avec une 12 cylindres de 160 ch vendue dans la gamme abordable des 1 500 dollars.

Avec cette 12 cylindres devait succéder, quelques années plus tard, une impressionnante 8 cylindres à compresseur, dernier modèle de cette marque.

Pour Cord, deux périodes marquèrent l'existence de cette version particulière.

-- D'une part, la construction, pendant trois ans environ, d'une voiture à moteur 8 cylindres en ligne, extrêmement longue, dénommée le type L 29; elle fut construite de la fin de l'année 1929 à juin 1932 et s'apparentait à la technique des voitures Miller de course.

Il en fut produit quelque 5 600 châssis, dont de nombreux furent exportés et connurent un grand succès, en dépit d'un comportement routier assez particulier.

-- D'autre part, la construction de 1936 à 1937, d'une voiture révolutionnaire, également à roues avant motrices, mais à moteur 8 cylindres en V : le type 810. En 1937, fut également lancé le type 812 à moteur à compresseur centrifuge. L'architecture d'ensemble suivait cette fois celle de la traction Citröen, née entre-temps. Cette voiture d'anticipation était parfaitement viable, mais manquait de mise au point à son lancement, qui fut catastrophique au point de vue commerciale. (Elle rappelait en cela les débuts difficiles de la traction avant Citröen).

Bien que cette Cord battît de nombreux records et notamment celui des Vingt-Quatre Heures pour voitures de série, elle ne put durer plus de deux ans. Elle cessa d'être fabriquée en août 1937, 3 200 unités en avaient été produites. Les outillages de carrosserie furent alors vendus à la marque Hupmobile (1939) puis à Graham (1941); ces deux firmes fermèrent leurs portes à leur tour avant 1945. Dans l'ensemble sa mise au point ne fut jamais achevée.

Auburn 851 "Speedster : Fondée en 1900 dans la ville du même nom, au cœur de l'Indiana, la marque Auburn survit péniblement lorsqu'elle est reprise en 1924 par l'entreprenant E. L. Cord qui en fit une auto à la mode, avec des carrosseries de style sportif, souvent peintes de couleurs vives, et des moteurs performants, le tout pour un prix abordable.

Le dernier sursaut : Ce succès n'est pourtant qu'un feu de paille, car dès 1932 les ventes déclinent. En 1934, Auburn présente une gamme remaniée à 6 ou 8 cylindres, dotée d'élégantes carrosseries, dont la vedette est incontestablement un très sportif speedster à deux places, que son moteur à compresseur emmène à 160 km/h -- vitesse garantie par écrit et confirmée par des essais longue durée sur la piste de sel de Bonneville.

Un succès éphémère : L'attrait d'une telle ligne ne suffit cependant pas sauver les finances de la firme, qui ferme ses portes à la fin de 1936. Moins de 500 Speedster ont été produits en deux saisons, sous le matricule 851 en 1935, puis 852 l'année suivante, sans changement notables. L'Auburn a vécu de même que les autres marques du groupe, Cord et Duesenberg, mais le speedster fera l'objet de nombreuses répliques, quarante après... c'est après tout un hommage au dessinateur : Gordon Buehrig, auteur également de la Cord 810.

La Cord 810 de 1936.

Source: L'Automobile (Antiquités et Objets d'art), aux éditions Fabbri, 1990.

Grâce Californienne : Toute grande étoile d'Hollywood se devait de posséder "sa voiture exclusive". La star mexicaine Dolorès Del Rio avait eu un choix heureux à l'image de sa beauté éclatante ; une Cord L 29 pour laquelle le maître carrossier Murphy, de Pasadena, avait imaginé et réalisé ce coupé de ville select (Ancienne collection Cameron Peck. Photo Don Mac Cray).

Inoubliable visage : Discutable, la traction avant Cord type L 29, de 1929-32, le fut certainement pour de nombreuses raisons techniques. Mais, étant donné la hardiesse de sa conception, cette initiative fut extrêmement remarquée, en raison surtout de l'indéniable beauté sportive de ce long ensemble surbaissé. La petite calandre très pure surmontant le différentiel avant, rappelait le style des "Miller" de course, modernisme bien en avance sur la Ford A et la Chevrolet 4-1928, aperçue au 2e plan (Autorisation de M. Herbert C Cnow, ancien ingénieur en chef de l'Auburn Motor Car Co).

Sans équivalence : Aucune voiture à radiateur à l'avant ne revêtit une silhouette aussi personnelle que la Cord, lors de sa réapparition à la fin de 1935. Un capot "alligator" coiffait un massif avant mono-pièce ceinturé d'autages horizontaux formant persiennes vénitiennes. Le reste de la voiture était digne de cette façade. Sur ce modèle 812 de 1937, 4 tuyaux souples s'évadent du capot, reliés au moteur V8 de 4 500 cm3, à compresseur de 170 CV. Parmi l'équipe qui créa cette série, citons Herbert C. Snow, vice-président de la société Georges Kublin, ingénieur en chef, Ted Allen, directeur de la Carrosserie, et son adjoint Burt Coller.

Source des trois photos: Les plus belles voitures du Monde, aux éditions Hachette, 1963.

En juillet 1935, Cord charge une équipe technique de concevoir la voiture. Gordon Buehrig dessine la carrosserie et crée une forme si belle et nouvelle qu'il est honoré par le Musée d'Art Moderne de New York... en 1952 !

Cette voiture est bien entendu une traction-avant, mais dotée cette fois d'un V8. En 1937, ce modèle est disponible en version 812, équipé d'un compresseur centrifuge Schwitzer-Cummins qui porte la puissance à 170, puis 195 ch. En principe, les voitures à compresseur sont reconnaissables à leurs tuyaux d'échappement chromés sortant du côté gauche du capot. Ces deux modèles sont malheureusement affligés de défauts de mise au point. Au total, moins de 3 000 Cord 810/812 sont construites, mais leur réputation reste immense, au point qu'on en construise récemment des répliques. L'empire de Cord (qui comprend notamment les firmes Lycoming, Checker, et une compagnie aérienne) est démantelée en 1937.

Cord part en Angleterre puis regagne la Californie pour s'occuper d'immobilier, où il réussit aussi bien. Le magazine Fortune le classe parmi les 50 Américains les plus riches : à sa mort, le 2 janvier 1974, sa fortune est estimée à 17 millions de dollars.